Ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs
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Portrait global de la qualité de l'eau des principales rivières du Québec

Édition 2004


État actuel de certains paramètres de la qualité de l’eau

Phosphore total

Nitrates et nitrites

Azote ammoniacal

Coliformes fécaux

Turbidité

Matières en suspension

Chlorophylle a totale

  • Phosphore total

Le phosphore est un des éléments nutritifs essentiels à la croissance des algues et des plantes aquatiques. Lorsqu’il est trop abondant dans un milieu aquatique, il en accélère l’eutrophisation, c’est-à-dire la prolifération des algues et des plantes aquatiques. Les activités agricoles et industrielles de même que les eaux usées non traitées des municipalités sont des sources parfois importantes de phosphore. Pour remédier à ce problème, de nombreuses stations d’épuration effectuent maintenant une déphosphatation de leurs rejets. Le critère de protection contre l’eutrophisation des cours d’eau se situe à 0,03 mg/l de phosphore total et celui des lacs, à 0,02 mg/l.

Les médianes estivales de phosphore total des bassins versants de la rive nord du Saint-Laurent ont été généralement plus faibles que celles des bassins de la rive sud. Les médianes mesurées à la tête de la majorité des bassins versants ont été, dans l’ensemble, plus faibles que celles observées à leur embouchure. De plus, au cours des étés 2000 à 2002, la plupart des stations des bassins versants à vocation agricole ont affiché des médianes estivales supérieures au critère de qualité de 0,03 mg/l. Ces médianes ont généralement été supérieures à 0,05 mg/l de phosphore total. Certaines ont même dépassé les 0,10 mg/l de phosphore total, allant jusqu’à 0,20 mg/l dans le ruisseau Norton (bassin versant de la rivière Châteauguay) et dans la rivière des Îles Brûlées (bassin versant de la rivière Chaudière). Les fortes concentrations de phosphore dans la ville de Shawinigan (rivière Shawinigan dans le bassin versant de la rivière Saint-Maurice) reflèteraient quant à elles l’impact de l’effluent de la papetière et des débordements des ouvrages de surverse.

Médianes estivales 2000-2002 des concentrations de phosphore total des rivières québécoises

L’examen des centiles 90 des concentrations en phosphore total démontre que les bassins versants à forte vocation agricole ont régulièrement présenté des concentrations élevées. Le portrait établi par le centile 90 montre que les bassins versants des rivières Châteauguay, Richelieu, Yamaska, Nicolet, Chaudière, Boyer, Bayonne et L’Assomption ont été aux prises avec une sérieuse problématique de surplus de phosphore en 2000-2002, les concentrations maximales excédant de deux, trois et jusqu’à six fois le critère de qualité de 0,03 mg/l. Ces valeurs élevées sont généralement liées à des épisodes de fortes pluies et de forts débits, entraînant une érosion des sols agricoles riches en phosphore.

Centile 90 des mesures de phosphore total au cours de la période 2000-2002

  • Nitrates et nitrites

Les nitrates et les nitrites constituent la forme la plus abondante et la plus stable de l’azote dans l’environnement. Naturellement présents en faibles concentrations dans les eaux de surface, les nitrates et les nitrites peuvent parfois se trouver en concentrations élevées dans les nappes souterraines des milieux agricoles. Lorsque ces concentrations sont trop élevées dans l’eau d’approvisionnement, elles peuvent causer de sérieux problèmes de santé (comme la méthémoglobinémie chez le nouveau-né). Un critère de 10 mg/l a été défini pour l’eau brute d’approvisionnement en eau potable, mais une telle concentration n’est que très rarement observée dans les eaux de surface québécoises. Une valeur repère de 1 mg/l sera utilisée ici afin de juger de la qualité. Cette valeur repère est utilisée comme borne pour distinguer les classes de qualité satisfaisante et douteuse. Lorsqu’une forme d’azote, comme les nitrates et les nitrites, dépasse à elle seule ce niveau, elle fait alors ressortir une problématique résiduelle pour ce paramètre. D’ailleurs, toute valeur médiane de nitrates et de nitrites supérieure à 1 mg/l identifie un cours d’eau comme étant de qualité douteuse.

La figure ci-dessous montre qu’il n’y a eu aucun dépassement du critère de 10 mg/l dans les principales rivières québécoises pendant les périodes estivales 2000-2002. Par contre, des médianes estivales plus élevées que 1 mg/l ont été enregistrées dans les rivières Boyer, Chaudière, Nicolet, Yamaska, Richelieu, aux Brochets, L’Assomption et Bayonne. De plus, quelques mesures élevées ont ponctuellement été enregistrées à certains affluents des rivières Chaudière et Richelieu. Globalement, les stations de la rive nord du fleuve Saint-Laurent de même que celles qui sont situées à la tête des bassins agricoles ont présenté de faibles teneurs estivales (≤ 0,5 mg/l) en nitrates et en nitrites. Ce constat suggère qu’à l’instar du phosphore, les fortes teneurs en nitrates et en nitrites sont principalement d’origine agricole.

Médianes estivales 2000-2002 des concentrations de nitrites et de nitrates des rivières québécoises

La répartition des centiles 90 des concentrations de nitrates et de nitrites démontre que les bassins versants supportant d’importantes activités agricoles ont enregistré des concentrations dépassant de deux à cinq fois la valeur repère de 1 mg/l (rivières Boyer, Chaudière, Yamaska et L’Assomption), et même jusqu’à plus de six fois le seuil repère (rivières Châteauguay, Richelieu et Nicolet).

Centile 90 des concentrations de nitrites et de nitrates au cours de la période 2000-2002

  • Azote ammoniacal

L’azote ammoniacal trouvé dans les eaux de surface du Québec provient principalement des processus de dégradation de l’azote organique (par exemple, celui qui est contenu dans les rejets d’eaux usées domestiques, les lisiers et les fumiers). Sous forme dissoute et non ionisée, l’azote ammoniacal n’est ni cumulatif ni persistant, mais il est toxique pour la vie aquatique. Cette toxicité de l’ammoniac varie selon la température et le pH de l’eau.  Parmi les critères de qualité de l'eau portant sur l'azote ammoniacal, un critère et une valeur repère seront utilisés ici. Le critère de qualité fixé à 0,5 mg N-NH3/l doit être respecté pour l’eau brute destinée à l’approvisionnement en eau potable  (au-delà de cette concentration, des difficultés à traiter adéquatement l'eau potable sont à prévoir) (MENV, 1998). Le critère de 0,5 mg N-NH3/l sera utilisé ici pour l’analyse spatiale des médianes estivales, puisqu'il permet de discriminer les classes de qualité « satisfaisante » et « douteuse ». Une valeur repère de 1,5 mg N-NH3/l sera utilisée comme borne supérieure de classification.

Seules trois stations ont affiché en 2000-2002 des médianes estivales jugées de qualité satisfaisante à douteuse (0,24 mg N-NH3/l  à 0,9 mg N-NH3/l). Aucune autre station du réseau de suivi n’a semblé être aux prises avec un problème d’ammoniac. Ces faibles médianes estivales pourraient être le résultat de l’accroissement du phénomène de nitrification lors du traitement des eaux usées municipales et de la réduction des apports d’ammoniac au cours d’eau en raison d’un meilleur entreposage des fumiers et des lisiers. Les étés très secs de 2000-2002 auraient également limité les apports d’azote ammoniacal liés au phénomène de ruissellement et de débordement d’émissaires de surverse.

En ce qui concerne la médiane estivale de 0,4 mg N-NH3/l notée à la station de Saint-Canut (bassin versant de la rivière du Nord), elle reflète les rejets d'ammoniac provenant de la station d'épuration municipale de Saint-Jérôme. Une mauvaise gestion des fumiers et des lisiers et l’utilisation des engrais minéraux pourraient, d’un autre côté, expliquer la médiane estivale de 0,32 mg N-NH3/l enregistrée à la rivière des Hurons (sous-bassin fortement agricole du bassin versant de la rivière Richelieu). Ces médianes estivales, plus élevées que les autres, respectent tout de même le critère de qualité de l’eau d’approvisionnement de 0,5 mg N-NH3/l et rendent compte d’une qualité d’eau jugée satisfaisante. La médiane estivale de 0,63 mg N-NH3/l notée à l’embouchure de la rivière de Shawinigan (bassin versant de la rivière Saint-Maurice) pourrait refléter l’impact des effluents de la papetière qui y est implantée et de quelques déversements et dérivations de l’usine de traitement des eaux usées. La médiane estivale déterminée pour cette station d’échantillonnage dépasse la concentration de 0,5 mg N-NH3/l  au-delà de laquelle des difficultés à traiter adéquatement l'eau potable sont observées.

Médianes estivales 2000-2002 des concentrations en azote ammoniacal des rivières québécoises

Les centiles 90 des concentrations d’azote ammoniacal ont démontré que quelques régions étaient toujours affectées en 2000-2002 par un problème de toxicité pour la vie aquatique lié à l’ammoniac. Ainsi, seulement 4 stations ont présenté des centiles 90 supérieurs à 0,9 mg N-NH3/l dans les bassins versants des rivières du Nord, Richelieu, Saint-Maurice et Fouquette (MRC de Kamouraska). Les teneurs enregistrées y ont été plus élevées que le critère d’approvisionnement de 0,5 mg N-NH3/l, mais elles ont été inférieures à la valeur repère de 1,5 mg N-NH3/l.

On a également constaté des dépassements du critère d’approvisionnement de 0,5 mg N-NH3/l dans les ruisseaux Saint-Pierre et Vacher, deux cours d’eau agricoles du bassin versant de la rivière L’Assomption, ainsi que dans la partie amont du bassin versant de la rivière Bécancour, tout près de Thetford Mines. Les débordements d’ouvrages de surverse pourraient expliquer les concentrations d’azote ammoniacal dans la ville de Thetford Mines, alors que les pratiques agricoles seraient à l’origine des concentrations plus élevées dans les bassins versants à vocation agricole.

Centile 90 des concentrations d'azote ammoniacal au cours de la période 2000-2002

  • Coliformes fécaux

Les coliformes fécaux sont utilisés comme indicateur de contamination fécale. Deux critères différents sont utilisés pour évaluer la qualité bactériologique de l’eau. Le premier critère de 200 UFC/100 ml s’applique à toutes les activités impliquant un contact direct avec l’eau (baignade, kayak, moto marine et planche à voile). Le second de 1000 UFC/100 ml, a été établi pour les activités récréatives impliquant un léger contact avec l’eau (canotage, pêche sportive, voile, etc.).

En raison de la méthodologie particulière utilisée dans notre réseau de surveillance des rivières (Réseau-rivières), qui limite l’échantillonnage de l’eau à un prélèvement mensuel unique prélevé au centre des cours d’eau, les mesures de coliformes fécaux ne visent qu’à donner une idée générale de la contamination des cours d’eau par les matières fécales. Elles ne peuvent être utilisées pour déterminer si la qualité bactériologique de l’eau est suffisante pour la pratique sécuritaire de la baignade. Seul le protocole du Programme Environnement-Plage permet de vérifier la conformité d’un site pour cet usage.

Au cours de la période 2000-2002, le tiers des stations échantillonnées présentaient des médianes estivales supérieures au critère de qualité relatif à la baignade. Plusieurs stations présentaient également une médiane supérieure au critère de qualité lié aux activités nautiques. Trois stations d’échantillonnage, localisées dans les bassins versants des rivières Richelieu, Chaudière et Boyer, ont même affiché une très mauvaise qualité bactériologique (>3500 UFC/100 ml). Les stations en milieu urbain qui ont présenté une mauvaise qualité bactériologique (>1000 UFC/100 ml) avaient connu des problèmes chroniques de débordement des réseaux d’égouts et de désinfection des eaux usées. C’était le cas à Québec (rivière Saint-Charles), à Thetford Mines (rivière Bécancour), à Saint-Jean-Baptiste-de-Rouville (rivière des Hurons, bassin versant de la rivière Richelieu), à Crabtree (rivière Ouareau, bassin versant de la rivière L’Assomption) et à Saint-Bernard et Saint-Narcisse (rivière Beaurivage, bassin versant de la rivière Chaudière).

Médianes estivales 2000-2002 des concentrations en coliformes fécaux des rivières québécoises

Les centiles 90 des concentrations en coliformes fécaux mettent en évidence les teneurs élevées liées aux précipitations et au ruissellement.

Le portrait réalisé grâce aux centiles 90 montre l’étendue du problème de la contamination fécale. Bien que les apports urbains constituent une source non négligeable de contamination, les activités agricoles (épandage des fumiers et des lisiers) seraient la principale source de la contamination bactériologique observée dans certains bassins versants (rivières Boyer, Chaudière, L’Assomption et Yamaska). L’importante contamination fécale mise en évidence en milieu urbain (par exemple, à l’embouchure des rivières Saint-Charles et des Mille Îles, et dans les rivières Bécancour et Nicolet près de Thetford Mines et de Warwick) illustre bien les problèmes liés aux débordements des réseaux d’égouts par temps de pluie.

Centile 90 des concentrations de coliformes fécaux au cours de la période 2000-2002

  • Turbidité

La turbidité d’une eau est causée par la présence de matières en suspension d’origine organique et inorganique, d’oxydes et d’hydroxydes métalliques, d’argiles, de silts, de planctons, de microorganismes et de substances dissoutes colorées. Une eau turbide protège les bactéries et les virus contre les procédés de désinfection de l’eau potable. Le critère d’exemption de 5 UNT (unités néphélométriques de turbidité) applicable à la filtration de l’eau brute en vertu du Règlement sur la qualité de l’eau potable sera utilisé pour la caractérisation du présent portrait spatial.

Les médianes estivales de 65 % des stations échantillonnées au cours des périodes estivales de 2000 à 2002 ont dépassé le seuil de 5 unités néphélométriques de turbidité. Les bassins versants situés en périphérie des grands centres urbains ont généralement affiché une turbidité plus faible. Leurs médianes estivales se classaient dans l’ensemble comme étant de qualité bonne à satisfaisante. Les sols naturellement très argileux et friables de l’Abitibi-Témiscamingue présentent, quant à eux, une problématique particulière pour ce qui est de la turbidité. Les médianes estivales qui y ont été mesurées ont dépassé le seuil de 5 unités néphélométriques de turbidité, allant dans certains cas jusqu’à plus de 18 unités néphélométriques de turbidité.

On a observé à l’échelle du territoire québécois un gradient de turbidité de la tête des bassins versants vers leur embouchure. Ce gradient a été particulièrement visible dans les bassins versants à vocation agricole. Les têtes de bassin versant des rivières L’Assomption, Richelieu et Châteauguay ont affiché une turbidité cinq fois plus faible que celle qui a été mesurée à leur embouchure. Le bassin de la rivière Yamaska a présenté une turbidité presque 10 fois plus élevée à son embouchure qu’à sa tête. Dans la plupart de ces bassins versants, l’augmentation de la turbidité qui va de la tête à l’embouchure du bassin s’accompagne d’un changement de région physiographique, qui nous amène du Bouclier canadien ou des Appalaches vers les plaines argileuses des basses terres, et ce, autant sur la rive nord que sur la rive sud du fleuve. Les basses terres du Saint-Laurent, naturellement sensibles à l’érosion, sont devenues encore plus vulnérables en raison de l’importance des activités agricoles qui occupent une grande portion du territoire.

Médianes estivales 2000-2002 des mesures de la turbidité des rivières québécoises

L’analyse de la répartition spatiale des centiles 90 concernant les mesures de la turbidité a démontré que les étés secs de 2000-2002 (qui ont causé une très forte diminution des niveaux d’eau) de même que les activités humaines sur les berges et les épisodes de fortes pluies estivales ont fait en sorte de lessiver le matériel fin et de concentrer sa mise en suspension.

La turbidité a été très élevée dans les bassins versants à forte activité agricole, comme par exemple, ceux des rivières L’Assomption, Châteauguay, Richelieu, Yamaska, Nicolet, Chaudière et Boyer. Les stations d’échantillonnage situées en milieu urbain ont aussi présenté des mesures élevées de turbidité. Elles laissaient présager une importante problématique résiduelle aux stations d’échantillonnage de Québec (rivière Saint-Charles), de Thetford Mines (rivière Bécancour), de Saint-Romuald (rivière Etchemin), de Berthierville (rivière Bayonne) et de Louiseville (rivière du Loup), pour ne nommer que celles-là.

Impact des précipitations et du débit sur la qualité de l’eau

Au cours d’une année, d’une saison et même d’une journée, la qualité de l’eau peut être très variable. Les phénomènes de ruissellement et d’érosion de même que les précipitations et les variations du débit d’un cours d’eau influencent énormément la qualité de l’eau. En période d’étiage, les concentrations de certaines substances présentes dans l’eau peuvent être beaucoup plus élevées que pendant le reste de l’année. À l’inverse, en période de crue, certaines substances se trouvent diluées dans un plus grand volume d’eau, alors que d’autres, qui atteignent le cours d’eau par ruissellement, se trouvent en concentration plus importante. Ainsi, les concentrations des substances naturelles non dissoutes provenant d’un processus d’érosion augmentent avec le débit; c’est le cas notamment des éléments d’origine géologique (matières en suspension, fer, aluminium, etc.) et des différentes substances (par exemple, le phosphore) qui y sont liées. Par ailleurs, les concentrations des divers polluants rejetés d’une façon constante et régulière dans un cours d’eau (on ne parle pas ici d’engrais ou de pesticides épandus sur les terres, mais plutôt de polluants d’origine urbaine ou industrielle) diminuent lorsque le débit augmente.

Lors d’épisodes de pluie et encore plus à la fonte des neiges, le transport, par ruissellement, de particules de terre vers les cours d’eau occasionne une augmentation des concentrations de phosphore, des matières en suspension et de la turbidité. Le faible couvert végétal des terres en culture, l’absence de barrières éoliennes, le compactage excessif du sol et le dénuement fréquent des rives des cours d’eau font des territoires agricoles un milieu particulièrement propice à l’érosion.

Centile 90 des mesures de la turbidité au cours de la période 2000-2002

  • Matières en suspension

Par matières en suspension, on entend toute particule organique ou inorganique qui se trouve dans l’eau. Les matières en suspension contribuent à la turbidité de l’eau et sont donc perçues de façon négative sur le plan esthétique. Une valeur repère de 13 mg/l de matières en suspension en milieu naturel sera employée à des fins de caractérisation spatiale. Ce seuil de 13 mg/l a été utilisé afin de départager les classes de qualité satisfaisante et douteuse.

La très grande majorité des bassins versants n’a pas affiché de problème particulier en ce qui concerne les matières en suspension au cours des étés 2000-2002. Les médianes estivales ont presque toutes été inférieures à 13 mg/l. Les seuls bassins versants qui ont enregistré des teneurs estivales plus élevées ont été ceux des rivières Yamaska et L’Assomption, deux bassins versants à très fortes activités agricoles. La qualité de l’eau en ce qui a trait aux matières en suspension a également été classée comme étant douteuse à mauvaise en milieu agricole aux embouchures des rivières Boyer, du Loup, Bayonne et des Hurons (bassin versant de la rivière Richelieu). Comme il a été mentionné précédemment dans la section traitant de la turbidité, les bassins versants de l’Abitibi Témiscamingue, qui traversent des sols argileux et friables, sont aux prises avec une problématique particulière de matières en suspension.

Comme pour la turbidité, la distribution spatiale des médianes estivales suit un gradient de l’amont vers l’aval dans les bassins versants. Les médianes estivales ont en effet été plus faibles à la tête des bassins étudiés, la qualité y étant jugée « bonne ». Ce gradient a clairement été observé dans les bassins versants à vocation agricole, tels ceux des rivières du Loup, L’Assomption, Yamaska et Boyer. Les médianes estivales étaient sous la limite de détection analytique de 3 mg/l à la tête des bassins versants des rivières du Loup et L’Assomption, et de 7 mg/l à la tête de la rivière Boyer, alors qu’elles y étaient respectivement de 27 mg/l, de 12 mg/l et de 17 mg/l à leur embouchure. Les médianes estivales ont de plus atteint des valeurs extrêmes dans le bassin versant de la rivière Yamaska. Elles étaient sous la limite de détection analytique à la tête du bassin et supérieure à 45 mg/l à son embouchure. Ces importants gradients de matières en suspension observés reflètent la présence d’argiles marines de la mer de Champlain dans les basses terres du Saint-Laurent. L’érosion de ces sols plus argileux et friables par les activités agricoles serait, entre autres, à l’origine de ces gradients de matières en suspension.

Médianes estivales 2000-2002 des concentrations de matières en suspension des rivières québécoises

Les centiles 90 des concentrations de matières en suspension (figure ci-dessous) ont démontré que les bassins versants soumis à d’importantes activités agricoles, industrielles ou municipales ont présenté des teneurs nettement plus élevées que les médianes estivales. On a ainsi observé ce phénomène dans les bassins versants des rivières L’Assomption, du Nord, des Mille Îles, Châteauguay, Richelieu, Yamaska, Saint-François, Nicolet, Chaudière et Boyer. Seules les stations à la tête des bassins versants, en milieu plus forestier, ont respecté la valeur repère de 13 mg/l.

Tout comme ce qui a été avancé plus haut en ce qui concerne la répartition des centiles 90 des mesures de turbidité, le temps sec et les très faibles niveaux d’eau des étés 2000-2002, les épisodes de fortes pluies estivales ainsi que les activités humaines sur les rives, auraient favorisé l'érosion des sols. Le travail du sol par la machinerie, le piétinement des rives par le bétail et l’absence de brise-vent ou de bandes riveraines ont favorisé l’érosion éolienne et hydrique du sol de ces bassins versants. L’accroissement considérable de la superficie des cultures à grands interlignes (par exemple celle du maïs) a fait en sorte qu’une grande partie des sols se trouve dénudée pendant plusieurs mois, ce qui entraîne la dégradation et l’érosion de ces sols. C’est ainsi que sur le plan environnemental, ces facteurs ont eu une incidence considérable sur la qualité des cours d’eau en provoquant un apport de matières en suspension et de certains contaminants (Synthèse des informations environnementales disponibles en matière agricole au Québec).

Centile 90 des concentrations de matières en suspension au cours de la période 2000-2002

  • Chlorophylle a totale

Pigment essentiel au processus de photosynthèse, la chlorophylle a est utilisée pour déterminer la biomasse phytoplanctonique d’un plan d’eau. Des teneurs élevées de chlorophylle a peuvent être indicatrices d’un problème d’eutrophisation. Une valeur repère de 8,6 mg/m3, séparant les classes de qualité satisfaisante et douteuse, sera utilisée pour l’analyse spatiale des concentrations.

La très grande majorité des stations échantillonnées (plus de 80 % des stations) a présenté des médianes estivales inférieures au seuil de 8,6 mg/m3. Comme on peut le constater à la figure ci-dessous, certains bassins versants à vocation agricole ont affiché des médianes estivales supérieures à 8,6 mg/m3. Les rivières Boyer, Chaudière, Châteauguay et Richelieu ont semblé être aux prises avec une problématique d’eutrophisation modérée. En général, les médianes estivales n’ont été élevées que dans la partie inférieure. D’autres bassins versants à vocation agricole, tels ceux des rivières L’Assomption, Bayonne et Yamaska, ont semblé quant à eux être affectés par un phénomène d’eutrophisation plus important. Les médianes estivales en chlorophylle a totale ont été très élevées, dépassant même les 13,9 mg/m3 (très mauvaise qualité) à l’embouchure du bassin versant de la rivière Bayonne et dans la partie inférieure du bassin versant de la rivière Yamaska. Ces médianes estivales très élevées seraient entre autres associées aux importantes charges de phosphore de même qu’aux très faibles débits d’étiage qui ont affecté ces bassins versants en 2000-2002.

Médianes estivales 2000-2002 des concentrations en chlorophylle a totale dans les rivières québécoises

Les centiles 90 des concentrations en chlorophylle a totale montrent que la plupart des rivières du Québec méridional ont été aux prises de manière épisodique avec une sérieuse problématique algale au cours de la période 2000-2002.

Les centiles 90 des concentrations en chlorophylle a totale ont été, dans la très grande majorité des cas, supérieurs à 13,9 mg/m3 (très mauvaise qualité) dans les bassins versants où la production agricole est importante : Boyer, Chaudière, Bécancour, Nicolet, Saint-François, Yamaska, Richelieu, Châteauguay, L’Assomption, Bayonne et des Envies (Mauricie), Ticouapé, et  Bédard (Saguenay—Lac-Saint-Jean) ainsi que Fouquette (MRC de Kamouraska).

Les stations situées en périphérie de milieux urbains ont également enregistré un problème de biomasse algale. Des teneurs importantes en chlorophylle a totale dans les rivières Saint-Charles (Québec), des Milles Îles (Laval), du Nord (Saint-Canut) et de Bécancour (Thetford Mines) ont été observées.

Le développement de la biomasse algale a été vraisemblablement favorisé par les faibles débits et les températures élevées caractéristiques des étés 2000-2002. Sous ces conditions, les apports en éléments nutritifs se traduisent par la croissance d’importantes biomasses algales, particulièrement dans les secteurs à écoulement lent des rivières.

Centile 90 des concentrations de chlorophylle a totale au cours de la période 2000-2002

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